L'été est une période creuse aux Etats-Unis du point de vue des séries, durant laquelle on rattrape ce qu'on a manqué pendant l'année écoulée. Cela était vrai il y a encore peu de temps. Mais depuis deux ans, l'été est le théâtre d'importants bouleversements, notamment sur les networks qui dégainent des séries de plus en plus ambitieuses pour pallier au désert télévisuel habituel de cette période. Cependant le câble n'est pas en reste, avec le retour de séries très attendues cette année encore (True Blood, Masters of Sex) et l'arrivée de sang frais (sans mauvais jeu de mot). Ainsi se sont succédés ces dernières semaines les plus ou moins réussies The Leftovers, The Last Ship, Tyrant, etc - que je suis loin d'avoir toutes vues. Et c'est dimanche dernier que la chaîne câblée FX - avec laquelle on ne sait jamais à quoi s'attendre - lançait l'un des projets les plus ambitieux de cet été : The Strain, adaptation en série d'une trilogie de bouquins, nous racontant à sa façon la fin de notre monde, choisissant les vampires plutôt que les zombies comme bouc-émissaires. Sans plus attendre, je vous propose d'en (re)découvrir le synopsis (personnel, celui d'Allociné présentant un peu trop de spoilers sur la suite de la série à mon goût...)

Alors qu'un avion atterrit à New-York sans qu'aucun signe de vie n'en émane (hum hum Fringe), l'agent Goodweather est appelé sur place pour comprendre les raisons de la catastrophe. Mais ce qui aurait pu être une attaque terroriste semble bien plus surnaturel qu'il n'y paraît : un cercueil étrange, contenant une forme de vie peu ragoûtante, est retrouvé à bord de l'avion, et pourrait être à l'origine de la fin du monde (enfin des Etats-Unis, donc du monde aux yeux de ses habitants...). Seul un survivant de l'Holocauste semble en mesure de vaincre la bête, tandis qu'un grand méchant (nazi ?) tire les ficelles dans l'ombre...

On pouvait craindre le pire. Cette énième série de vampires aurait pu vite tourner au ridicule, d'autant que son histoire n'admet guère de second degré. Cependant elle s'impose dès ce pilote comme un divertissement haut de gamme s'appuyant sur de grands noms pour assurer le spectacle : Guillermo Del Toro (Le Labyrinthe de Pan) au scénario - épaulé par Carlton Cuse de Lost - et à la réalisation du pilote, Corey Stoll (déjà très touchant dans House of Cards) et David Bradley (auquel on semble ces derniers temps réserver des rôles de vieillards flippant - Game of Thrones, Broadchurch) dans le casting principal et Ramin Djawadi pour l'ambiance sonore (Prison Break, Game of Thrones, Person of Interest). Ce pilote, pourtant long d'une heure, n'est pas ennuyeux une seule seconde. En cela, la série est parfaitement réussie, tenant ses promesses de divertissement horrifique.

Divertissante, la série l'est. Oui. Mais j'y reviendrai tout à l'heure. Car, avant de s'enthousiasmer, réfrénons quelque peu nos espérences. The Strain, dès ce premier épisode, joue cartes sur table en nous montrant ses forces comme ses faiblesses. Ainsi, bien qu'embarqués dans son intrigue prenante, on est très vite confrontés au manichéisme de certains des personnages de la série (on voit déjà les héros se dessiner et le grand méchant, tout droit sortit d'un bon vieux James Bond, ne semble pas avoir une once d'humanité), ainsi qu'aux clichés (évidemment, le héros a eu une aventure avec sa collègue) et aux situations absurdes (sérieusement, qui irait à la rencontre d'une bête étrange au fond d'un couloir mal éclairé ?). Et puis, par pitié, quitte à parler français, les responsables du casting n'auraient-ils pas pu embaucher des vrais francophones, et non des acteurs américains ne comprenant pas un mot de ce qu'ils disent (tout comme nous d'ailleurs...) ? Enfin la voix-off intervenant au début et à la fin du pilote pour déblatérer des banalités (comme tant de séries l'ont fait en bien mieux) qui n'ont somme toute pas grand chose à voir avec l'histoire est assez pénible et sera, je l'espère, très vite abandonnée.

Les facilités narratives et manques de subtilité emputent à la série une partie de son potentiel, ne pouvant explorer pleinement son univers fantastique glaçant, comme sait habituellement habilement le faire Del Toro. Nous n'allons pas pour autant bouder notre plaisir. Effets simples mais efficaces, tension et mystère planants, réalisation solide, effets spéciaux tout à fait corrects : la série a tout pour être l'un des succès US de l'été. Il sera difficile d'entièrement me conquir après un départ comme celui-là, mais il faut tout de même souligner le fait que la série a un certain potentiel. L'histoire, basée sur des livres, devrait être assez solide pour nous tenir en haleine un petit bout de temps, d'autant que la série semble loin d'avoir livré tout ses secrets...

The Strain a donc suffisamment d'arguments pour retenir notre attention, bien que n'en ayant pas (encore ?) assez pour marquer les esprits. J'accepterai pour ma part de lui céder une petite heure de mon temps chaque semaine pour suivre son intrigue et la voir (je l'espère) s'améliorer au fil du temps. Quoi qu'il en soit, cette histoire de vampires morts-vivants vaut le coup d'oeil - attentif ou non. Et qui sait ? Nous pourrions peut-être bien finir par tomber amoureux de ces bons vieux suceurs de sang.

fx

The Strain - Critique du pilote (1x01)